Passionné de jeux d’action et d’aventure, je me retrouve confronté à ma plus grande hantise, le crafting et le farming. Et pourtant, je me laisse complètement happé par Spiritfarer, un jeu si éloigné de mes standards, mais qui recèle tout ce qui selon moi fait d’un jeu vidéo une œuvre d’art à part entière.

Avant d’aller plus loin, il faut bien prendre en compte le contexte dans lequel il m’est permis de jouer à Spiritfarer. Je suis en vacances, avec mes enfants certes, mais sans avoir à me dire que mon temps est limité, en somme tout ce qu’il faut pour apprécier ce jeu à sa juste valeur.

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Genre : Aventure, Gestion, Simulation

Durée de vie : environ 30h

Difficulté : Aucune

Plateformes : Switch, Xbox One, Steam, PS4

Développé par : Thunder Lotus

Sortie Switch : 18 août 2020

Direction Artistique

Commençons par la raison pour laquelle je voulais absolument jouer à ce jeu. Je suis un fan absolu des dessins, musiques, effets sonores du studio Thunder Lotus. C’est donc prêt à m’immerger dans cette ambiance familière que je lance Spiritfarer… et c’est la douche froide! Non pas que ce soit moins beau ou moins immersif, mais c’est extrêmement différent! Ici tout est coloré, gentil, tranquille. Et si cet eldorado pour bisounours m’a donné la nausée de prime abord, je me suis vite rendu compte que l’idée est de nous plonger dans une atmosphère douce et confortable, et ça fonctionne. Les musiques calmes avec quelques notes de flûte ou de piano, le cri des mouettes ou les ronflements de nos convives contribuent grandement à instaurer ce climat de détente.

Des bisous partout… sur le nez dans le cou!

Il s’agit clairement du jeu qui rend le moins justice à la qualité des dessins du studio, mais je dois reconnaitre qu’encore une fois, ils savent exactement quand et comment amener les moments forts par un savant mélange d’animations et de sons. Moi qui aime tant les ambiances sombres et oppressantes, je me suis laissé caresser dans le sens du poil par les couchers de soleil alors que je naviguais sur ma péniche aux allures de bateau de croisière pour bestioles en mal d’attention.

Si certains lieux, comme le Seuil Eternel, ne manquent pas de nous ravir les pupilles, les plus beaux moments restent ceux, plus intimes, pendant lesquels on discute en privé avec l’un de nos passagers. Un zoom se fait alors sur les personnages concernés et on peut apprécier tous les détails des dessins et des animations, cachés la plupart du temps par une vue bien trop lointaine. C’est d’ailleurs ce choix de caméra distante, couplé à l’aspect très cubique des constructions sur notre bateau, qui viennent occulter la qualité des graphismes du jeu.

Histoire

L’histoire de fond est relativement simple: on incarne Stella, qui vient de mourir et rencontre Charon, qui lui annonce qu’elle va devoir le remplacer. Notre tâche consiste donc à parcourir le monde des âmes en accueillant à bord de notre bateau les esprits qui n’arrivent pas à franchir le Seuil Eternel, afin de réaliser leurs dernières volontés.

Oui on fait beaucoup de câlins dans ce jeu

Ce n’est pas le scénario qui porte le jeu, mais plutôt la façon dont on découvre les personnages et leur histoire. Chacun d’eux est basé sur une personne que les développeurs ont connu dans leur vie, et ça se sent. S’ils peuvent paraître stéréotypés dans un premier temps, ils ont tous une personnalité riche et unique. Apprendre à les connaitre est un véritable plaisir, et alors qu’ils comprennent ce qui les retient dans ces limbes, ils nous prodiguent un dernier enseignement qui justifie toute l’aide qu’on leur a apporté jusque là. Le lore des différentes îles que vous parcourez ne sert en fait que de décor, permettant la mise en scène de ces personnages si hauts en couleur. D’ailleurs le langage utilisé est souvent très familier, ce qui ajoute à l’authenticité de ces esprits, mais explique le pourquoi ce jeu est déconseillé aux moins de 12 ans.

Si Stella ne déroge pas à la règle du protagoniste silencieux, on devine son histoire par petites bribes tout au long de l’aventure. C’est le récit qui m’a le plus ému, peut-être parce que, tel un puzzle, on doit en assembler les pièces nous-même.

Gameplay

Pour prendre soin des occupants de son bateau, Stella va devoir leur construire des logements, leur donner à manger, et satisfaire leurs diverses exigences. Tout cela divise le gameplay en 3 catégories

La fabrication

Les esprits qu’on accompagne n’arrêtent pas de nous en demander plus, et pour les combler il va falloir concevoir toujours plus de bâtiments, améliorer votre bateau, cuisiner, jardiner, et j’en passe. Si la plupart de ces conceptions peuvent être effectuées en une pression de bouton, les ressources intermédiaires comme les planches de bois, les tissus ou les métaux, demandent toutes de faire un mini-jeu pour les obtenir. La qualité de ces activités varie mais, heureusement, elles sont nombreuses et on a rarement besoin de faire la même activité en boucle (à part la forge, que je déteste tout particulièrement).

Le farming

Pour récolter les ressources nécessaires au crafting, une multitude d’options s’offre à nous. Si on met de côté les plus classiques comme la pêche, le jardinage, la récolte de minerai, certaines ressources ne seront obtenables que par le biais d’évènements. Je pense notamment aux bancs de méduses volantes qu’il faut attraper alors qu’elles survolent le bateau. Les occupations sont diverses et la quantité de ressources nécessaire n’est pas très élevée, ce qui diminue cette impression de routine, très forte généralement dans ce genre de jeu. Je vais pas vous mentir, on doit quand même arroser un sacré paquet de fois les plantes…

L’exploration

Afin de trouver où récolter les ressources nécessaires, il faut partir explorer de nouveaux horizons. La carte du monde des âmes est plutôt balèze, et explorer chaque île promet un bon nombre d’heures de jeu. C’est d’ailleurs sur ces îles qu’on va rencontrer de nouveaux esprits, qui nous accompagneront ou non, ainsi que des marchands. Toutes ne contiennent pas de ressources mais elles valent la peine d’être visitées, ne serait-ce que pour les décors toujours aussi beaux. Les voyages en mer peuvent être long, mais ils servent de prétexte à s’occuper de la vie sur le bateau. Discuter avec les voyageurs, les nourrir, s’occuper de son potager, etc… Petit bémol, chaque nuit, le bateau s’arrête. Il ne redémarre qu’au petit matin et vous n’avez d’autre choix que d’attendre ou d’aller dormir. Je n’ai pas trouvé que cette mécanique apportait quoi que ce soit au jeu à part casser le rythme qu’on essaye de mettre en place.

Et l’action dans tout ça?

À part quelques rares scènes de platforming, il n’y a aucune action dans Spiritfarer. Ça m’a déstabilisé au début, mais je me suis vite rendu compte que c’était un choix délibéré de la part des développeurs. Le but de ce jeu est de vous faire ressentir un sentiment de confort et de tranquillité. Aucune des activités que vous faites n’est chronométrée, on peut recommencer à volonté, on peut même laisser un plat dans le four pendant plusieurs jours avant qu’il ne brûle. On ne peut pas se dire: « Merde, j’ai oublié d’arroser mes plantes il faut vite que j’y aille! ». On peut passer devant et se dire qu’on le fera plus tard. J’ai quand même ressenti une certaine lassitude en approchant de la fin du jeu, certainement due au fait que m’occuper de mon jardin c’est pas ma passion, alors le faire dans un jeu vidéo…

Mini bonus : une option multijoueur est disponible, mais à moins que vous ne vouliez sous-traiter les tâches ingrates à un de vos enfants, ça manque profondément d’intérêt.

Quelques détails dérangeants

Je pense qu’il est important de préciser les quelques soucis que j’ai eu liés à la version Switch du jeu ou à sa localisation. J’ai subi quelques crash (5 ou 6) durant ma partie, dont un qui m’a fait perdre 10 minutes de jeu. Je voulais aussi relever certaines traductions françaises approximatives, qui ne m’auraient pas dérangé en temps normal, mais quand on sait que les développeurs sont francophones je trouve ça dommage.

Conclusion

Au delà du jeu vidéo, Spiritfarer tente de nous raconter l’histoire de ces personnes, de nous transmettre leurs valeurs afin que nous ressortions avec quelque chose en plus, que ce soit des leçons de vie, une plus grande empathie ou juste le sentiment de s’être reposé l’esprit. Si le gameplay et la direction artistique en font déjà un jeu agréable à parcourir, ce sont les discussions avec les esprits qu’on accompagne qui font de ce jeu une œuvre unique et mémorable. Mon seul regret est d’avoir dit à ma femme que ce jeu lui plairait. Ça fait maintenant plusieurs jours qu’elle ne lâche plus la Switch!

Que vous soyez amateurs de jeux de farming, de beaux dessins ou que vous ayez juste besoin d’une pause, Spiritfarer vaut la peine d’être fait. C’est une véritable parenthèse de vie, de laquelle on ressort apaisé. Prévoyez quand même un bon petit jeu d’action après ça, histoire de réveiller un peu vos réflexes.

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